La Maison Tolas Helann avait un rêve... Le rêve d'éclore en toute simplicité, de trouver la sérénité, une harmonie, et le bonheur de créer, en famille, au travers d'une vie simple et sans histoires mêlée de passion, des boissons artisanales faites avec amour, avec des ingrédients sains et naturels, puis de transporter par leur biais le monde autour d'elle avec elle dans son univers idyllique de merveilles teintées de mystères...

C'était un beau rêve. Un rêve de paix. Un rêve de poésie. Un rêve de félicité. Rien de plus.

Ce rêve ne verra jamais véritablement le jour, malgré les efforts décuplés et désespérés pour faire face au mal l’ayant assailli. Ce rêve aura été tué dans l’œuf… La Maison Tolas Helann n’aura pu que le caresser un temps. Sacrifiée, pour être tombée sur le mauvais article de journal, avoir rencontré les mauvaises personnes, au mauvais moment... On ne lui aura pas laissé le temps de dévoiler son âme immense et bienveillante avant de la souiller lâchement.

L'histoire de l'escroquerie ayant bouleversé le destin de la Maison Tolas Helann a été dépeinte de diverses façons, notamment par les escrocs eux-mêmes ainsi que leurs alliés, soucieux de préserver leurs réputations, ou de manipuler l'opinion, soit à leur guise, soit à des fins commerciales, et tout cela au mépris de la vérité.

Cette version-ci est celle de la Maison Tolas Helann elle-même, contée au travers des yeux de son fondateur ; soit, peut-être pas la version la plus objective, penserez-vous, mais néanmoins la seule, jusqu'à preuve du contraire, qui soit appuyée par de nombreuses pièces justificatives, preuves et autres témoignages.

Cet historique des faits réels est raconté ici à des fins informatives, par soucis de justice, afin que la vérité soit accessible au moins quelque part pour le grand public, mais aussi pour servir d'avertissement et de moyen de prévention, afin que ce dernier soit sensibilisé au phénomène sans âge mais de plus en plus inquiétant des escroqueries en tous genres.

Voici l'histoire de la tromperie qui aura coûté son rêve à la Maison Tolas Helann...

La tromperie...

Il me dit d'aller la chercher au domicile de l'ancien gérant ! Ce que je fis donc, quoique qu'un brin surpris par les méthodes employées. Dans les jours qui suivirent je pu accéder, enfin, seul et fier, au local où se trouvait mon "trésor"... Je déambulai dans ce capharnaüm et pu visiter les pièces cachées. Je tentai de vérifier l'inventaire tant bien que mal. Et il m'apparut très vite qu'il manquait des choses... Notamment des stocks de bières, du matériel, et l'informatique au grand complet ! A la même période, je commençai à être mis en relation avec plusieurs anciens employés de l'ex gérant, qui m'invitèrent tous à rester vigilant avec ce dernier, qui avait semble-t-il une face cachée ; une face ayant tendance à être "filoute"... L'ange était à priori quelque peu démoniaque... Dès lors je commençai à prendre mes distances avec cet homme louche. Mes nouveaux informateurs m'indiquèrent aussi que je n'avais pas rêvé concernant les stocks manquants. Et pire, ils m'informèrent qu'il y avait, dans les stocks de bière soi-disant à revendre, une bonne partie qui était infectée par la fameuse bactérie des vieux tuyaux ! Par peur d'être moi-même suspecté pour les stocks manquants, et, du reste, qu'il ne soit trop tard pour faire marche arrière, je m'empressai d'en avertir le mandataire judiciaire responsable. "A vraiment ? Les stocks sont contaminés ? Il manque des choses ? Pas de problème ! Faites-moi un courrier récapitulatif et nous allons revoir le prix à la baisse ou annuler la vente". Je senti bien qu'il avait eu l'air faussement surpris, mais qu'importe puisque qu'il m'assura que ces problèmes seraient réglés. Je lui envoyais donc son courrier le soir même, rassuré.

Dans la foulée, j'appris que le local que nous avions trouvé nous était finalement refusé, et je dû en chercher un autre en catastrophe. Le stress fut à son comble (enfin, c'est ce que nous pensions). Néanmoins, je finis par trouver notre local, celui de Freyming-Merlebach. Et au passage, je rencontrai le mystérieux investisseur qui devait reprendre la brasserie mais qui s'était désisté au dernier moment. Il resta relativement discret sur les raisons de ce désistement, dans un premier temps, mais j'apprendrais plus tard que c'était justement parce que des vices cachés inquiétants avaient été découverts. Toujours sans réponse du mandataire judiciaire (même pas à mes courriels expliquant le problème du local qui engendrerait un retard au déménagement), je dus continuer d'avancer dans le projet, car d'énormes sommes d'argent y avaient été investies, les économies de toute une vie, et en parallèle nous commencions à avoir des charges à payer, il fallait commencer à gagner de l'argent le plus rapidement possible ! Pas le temps de réfléchir, il fallait agir ! Alors je commençais le déménagement, avec l'aide de mes deux futurs employés, très motivés. Nous dûment démonter à la main le rideau métallique électrique du vieux local. Le mandataire n'avait pas tenu parole concernant l'eau et l'électricité. Mon achat se trouvait donc emprisonné, il fallut le délivrer avant de débuter. Le déménagement fut intense et rude. Nous dûment abandonner sur place un grand nombre de choses inutilisables. Du reste, c'était une véritable déchèterie, cette brasserie. Quand je pense qu'il s'y était trouvée une production de type alimentaire... Mais puisque le mandataire m'avait laissé tombé , je ne pris pas la peine de faire le ménage. Enfin, nous finîmes par y arriver !

Et, au final, lorsque nous déballèrent notre "trésor" dans le nouveau local pour commencer à le mettre en place, nous réalisâmes qu'il manquait encore bien plus de choses que nous le pensions. Sans compter que les matières premières étaient toutes périmées ou que de nombreux objets étaient hors d'usage. Alors je relançai de plus bel le mandataire judiciaire, mon inquiétude grandissante. Certes il s'agissait d'un achat en liquidation judiciaire, et donc sans garantie, mais ce que nous découvrions ne correspondait pas à ce qu'on nous avait promis, ni à l'inventaire fourni, et cela, c'était un vice de procédure, une livraison non conforme de notre achat, un motif d'annulation plus que valable, en théorie. Mais surprise : je dû bien me rendre à l'évidence : le mandataire judiciaire ne répondait plus ! Ni aux tentatives d'appels téléphoniques, ni aux messages, ni aux courriels... il faisait le mort. Son discours rassurant lors de notre dernière conversation sembla n'avoir été qu'illusion, une technique pour se débarrasser de moi et gagner du temps. C'est alors que les choses commencèrent à sentir sérieusement le roussi...

A partir de là, sur une période de plusieurs semaines, voire quelques mois, durant lesquels nous mettions petit à petit en place notre projet tant bien que mal, sans jamais plus de réponse du mandataire, une avalanche de mauvaises surprises nous tombèrent dessus, et peu à peu, aussi, par le biais de diverses sources, témoins, ou victimes, nous apprîmes qui étaient nos escrocs... La liste est longue, mais voici un aperçu de notre quotidien durant cette période :

- Nous reçûmes un appel de la préfecture nous informant que nous avions encaissé une subvention de 86.000€ pour promouvoir l'art du brassage à la main, et que nous devions le rembourser car la promesse n'avait pas été honorée. C'est l'ancien gérant qui leur avait donné nos coordonnées... Nous leur expliquâmes la situation et nous fûmes finalement mis hors de cause. En attendant, l'argent avait disparu. Et le comble dans cette histoire, c'est que l'ancien gérant, qui communiquait énormément sur sa bière "faite main", n'avait en vérité jamais brassé à la main ! Ses cuves étaient motorisées...

- Un jour, nous avons été convoqués par le service des douanes. Je ne peux pas dire toutes les choses que nous y avons apprises (que l'on peut aisément deviner quand on sait que les brasseurs doivent payer des taxes sur les quantités de boissons alcooliques produites). L'objet de la convocation était l'alambic... Ce dernier n'était pas déclaré, il avait été acheté sous le manteau par l'ancien gérant et nous avait été revendu illégalement ! L'alambic a dû être shunté, inutilisable ...............................

- Un jour, un ami spécialisé dans le monde de la viticulture goûta l'une des bières de l'ancienne brasserie, et cru y reconnaitre le goût provoqué par certaines bactéries bien spécifiques. Il expliqua que si effectivement ces bactéries il y avait, alors elles devaient être partout, dans les moindres recoins, que tous les stocks devaient être touchés, et surtout, que le matériel aussi. Ce fût la douche froide. Après vérification, il avait raison. On nous avait vendu, en toute connaissance, du matériel contaminé, inutilisable en l'état !

- Nous réalisâmes que l'inventaire vendu datait de 7 mois avant la transaction, et qu'il y avait eu une poursuite d'activité entre-temps. Nous apprîmes aussi que l'ancien gérant avait vendu au noir des stocks de bière sur les marchés.................

- Nous apprîmes que la vieille brasserie avait été cambriolée après inventaire. Pas étonnant que nous ne trouvâmes jamais toute la partie informatique ! On n'avait pas jugé utile de nous prévenir... Et on nous avait vendu ce matériel ! Du matériel inexistant !

utilisation de houblon pourri

médaille de l'assemblée, bière croix rouge ukraine : selon les dires des employés, jamais un centime n'aura été reversé aux organismes en question, il ne s'agissait que de stratégies commerciales trompeuses visant à vendre en jouant sur la bonté des gens tout en se faisant passer pour bienfaiteurs...

l'ange était démoniaque

bilans trafiqués

changement de local imposé : on apprendra que c'était pour cause de loyer jamais payé en 2 ans !

inventaire plus de 7 mois + poursuite d'activitée + revente au noire sur les marchés

infirmières covid et ukraine : tout dans la poche.

- - - En travaux - - -

« Avril 2023. J’avais 38 ans. Cela faisait déjà quelques années que je pensais à une reconversion professionnelle. Changer de vie. Ne plus travailler que pour en vivre, mais aussi donner un sens à sa vie ; travailler par plaisir, tout en en vivant. C’était décidé, oui, j’allais me lancer ! … Mais dans quel domaine ?

C’est dans ce contexte que je suis tombé, par hasard, un beau matin, sur un article de journal dépeignant les déboires d’une brasserie artisanale locale qui était en liquidation judiciaire et cherchait désespérément un repreneur, afin de perpétuer le "savoir-faire".

Savoir faire, je ne demandais que ça, moi ! Un métier artisanal, c’était une idée séduisante. Et qui plus est, la bière était l’un de mes centres d’intérêt depuis mon adolescence : collectionner tout ce qui s’y rapporte, visiter des brasseries, se tenter à en faire soi-même, et bien sûr, en déguster le plus possible ! D’ailleurs, ma femme nous en apportait des nouvelles à découvrir une fois par semaine, et il se trouve que nous en avions dégustées de cette brasserie en question peu de temps avant. Nous n’avions pas accroché, pour être honnête, cette bière était un brin… étrange. Peu harmonieuse, acide, rustre, brute de décoffrage, sans équilibre, entre-autres…

Dans cet article de journal, l’occasion semblait néanmoins à saisir : le gérant vantait les mérites de sa brasserie, un outil de production en parfait état ! Et le journal mentionnait aussi une médaille reçue pour son engagement dans le social. Cela présentait bien, que du positif. D’autant que s’ils fermaient c’était vraisemblablement dû à un concours de circonstances des plus malheureuses, ce n’était donc pas chose inéluctable. Du moins, en apparence…

Ce fut une révélation... Moi qui d’ordinaire suis plutôt terre-à-terre, je dois bien avouer que sur ce coup-là je me suis surpris à croire… Croire à un coup du destin ! J'ai pris contact immédiatement, le jour-même, tellement persuadé que ma bonne étoile me tendait cette merveilleuse opportunité. J’ai foncé tête baissée, sans jamais la relever un instant. Le pigeon idéal pour tout escroc, en sommes. Ce fut ma principale erreur, si ce n’est l’unique.

J'ai été mis en relation très rapidement avec l'ancien gérant de la brasserie en liquidation judiciaire, pourtant légalement destitué de ses fonctions (mais je n'ai pas été surpris car c'est une pratique assez courante dans le milieu des liquidations judicaires). Au téléphone, cet inconnu d'apparence cordiale et de confiance me donna rendez-vous le jour de Pâques sur le site de l'ancienne brasserie.

Sur place, chapeau vissé sur la tête, canne et long manteau, l'homme nous apparut étrange, d'un premier abord, mais pour autant je ne me méfiai guère, ce n'était pas une raison valable, après tout. Les lieux étaient véritablement sinistres, et pour le moins insalubres. L’homme au chapeau nous les fit visiter ; il avait encore sa clé… « Un arrangement avec le mandataire judiciaire » dit-il en se donnant des airs de personnage important, sur un ton très fier. Le local était plongé dans le noir, l’électricité avait été coupée, au même titre que l’eau. Tout était déjà démonté, emballé, et placé sur des palettes filmées, prêtes pour le départ. L'explication était qu'un investisseur avait voulu racheter mais s'était ensuite désisté au dernier moment (pour le coup, ça, c’était vrai ! mais j’y reviendrai plus tard…). Nous n'avons donc pas pu voir la marchandise, au final, ou très peu, mais qu’importe puisque l'homme nous remit, outre ses précieuses explications, le sacrosaint inventaire d'huissier listant tout ce qui était là à racheter.

Nous lui avons fait confiance, pensant qu'il n'avait de toute façon rien à y gagner à nous mentir... Et puis, derrière lui, il y avait aussi le mandataire judiciaire, responsable de la vente, qui à nos yeux ne pouvait être que de confiance, puisque représentant les institutions !

Nous croisâmes aussi des tas de cuves IBC 1000L et autres tonneaux de plastiques remplis de bière qui nous intriguèrent. L’homme nous expliqua que c'était en partie de la bière en cours de fermentation, récupérable, et en seconde partie de la bière qu'il avait moins bien réussie et qu'il conservait afin de la distiller en Moonshine (une sorte de whisky de bière). Encore une valeur ajoutée ! Il en profita pour préciser qu'il y avait d'ailleurs un alambic à distiller dans le lot à racheter ! Et cela tombait bien, car je rêvais de pouvoir faire mes propres spiritueux ! Du reste, sans que nous ne nous en rendions compte, il ne nous fit pas voir certaines pièces cachées ; la visite avait été millimétrée.

À la sortie, l'ex gérant nous assura que l'outil de travail était en parfait état de fonctionnement, tout équipé (production, informatique, boutique, etc… Aucun investissement annexe à prévoir), qu'il y avait une vaste clientèle à récupérer, dont plus de 250 clients pros, des employés compétents à reprendre, etc... Le petit plus : un gros stock de bière finie, vendable immédiatement, à hauteur d'une somme équivalente à celle d’une voiture neuve, de quoi nous assurer des débuts sereins ! Et cerise sur le gâteau : selon lui, à elle seule, la remplisseuse "KTM" valait plus que ce que nous pourrions offrir comme prix pour le lot complet !

De son côté, s'il avait mis la clé sous la porte, c'était soi-disant à cause du Covid, d’un déménagement mal temporisé, de sa trop grande générosité, ou encore d'une bactérie située dans les vieilles conduites d'eau du local (et que le méchant assureur n'avait pas daigné prendre à sa charge - nous en comprendrons les raisons bien plus tard...). Mais il nous rassura... En effet, puisque le propriétaire du local souhaitait le récupérer et que nous devions en changer, le problème ne se poserait pas.

Il nous fit au passage un récit larmoyant de ses embûches, pour nous attendrir… Il avait un handicap physique, un énorme pincement au cœur de quitter son bébé, il perdait énormément d’argent avec cette liquidation, risquait de perdre sa maison, etc… Un récit digne du véritable Calimero. Or, là encore, nous serons surpris plus tard de quelques vérités apprises concernant cette histoire tragique qu’il conte inlassablement à chaque coin de rue…

En attendant, en ce qui concernait notre investissement, on nous décrivit une affaire qui roule, avec peu de risques. Un bel avenir à portée de main !

L’homme était bon vendeur, il faut le lui laisser…

Avec ce rêve à portée de main, je continuai de foncer, toujours tête baissée. Nous nous lançâmes donc dans les démarches (business plan, offre d’achat, rendez-vous avec les banquiers, etc…), mais aussi dans la recherche d'un nouveau local, puisque nous étions priés de débarrasser le plancher !

L'ex gérant au chapeau nous fournit des bilans d'activité, à notre demande, avec un peu d’attente et en nous précisant timidement que sa comptable y avait fait "des erreurs", qu’il ne fallait pas trop y faire attention ni trop s’y attarder... (nous n'avons pas vraiment tilté à ce moment, non… mais évidemment qu'il les avait trafiqués...).

Il m'aida ensuite, "gentiment", à faire mon business-plan à présenter au banquier ; plan financier qui serait dès lors les "rails" de notre projet. Pour ce faire, il m'expliqua tout ce qui serait possible de faire conformément à sa grande expérience passée : quel volume de production, combien de chiffre d'affaires estimé, combien d'employés je pourrais reprendre sans risque (c’était 3 ou 4, selon lui. Il se vantait même d’en avoir eu une douzaine, lui. Mais je réduisis à 2, car on n’est jamais trop prudent !), combien de loyer nous serions à même de supporter, etc… Ensuite, il nous conseilla sur la somme à proposer au mandataire judiciaire, tel un bon ami qui nous veut du bien, critiquant au passage et tournant au ridicule ledit liquidateur, comme si le plan était de gruger ce dernier pour obtenir le bien à un prix dérisoire. Et, pour nous, qui étions novices, il nous rédigea même notre première offre d'achat à présenter au mandataire judicaire en charge de la vente ! Un véritable ange...

Les banquiers, comptables et expert-comptable, les associés, les amis, après étude du business-plan présenté, sur la base des informations fournies par l'ancien gérant, validèrent tous le projet avec enthousiasme (comme quoi, je ne fus pas le seul à m'être laissé berné...). En parallèle nous trouvâmes un local !

Place aux négociations !

Le mandataire judiciaire, vendeur officiel, je ne le connaissais pas, mais l’ancien gérant m’avait insinué, avec un sourire en coin, qu’il l’avait dans sa poche, et aussi que l’on pouvait faire de "bonnes affaires" avec lui… (sous-entendant qu’il pouvait se montrer arrangeant sous certaines conditions… voire… peu scrupuleux). Quelques-uns de mes proches et connaissances l’ayant côtoyé me décrivirent un "Personnage", un "drôle d’oiseau", aux pratiques douteuses, aux principes légers et à l’honnêteté toute relative. Une réputation partiellement confirmée par les avis laissés sur internet, mais je ne m’en formalisai pas. Je l’approchai d’abord par courriel…

Après deux premières offres (tout à fait honnêtes) qui furent refusées par le mandataire judiciaire, les jugeant trop basses, à notre troisième proposition surenchérie, il accepta ! Le prix semblait encore correct, à mes yeux, pour cette merveille que nous avait dépeint l’ex-gérant.

Et c’est alors que je fus convié au cabinet du liquidateur en question pour concrétiser cette vente. Je découvris, en effet, un sacré personnage, mais plutôt cordial envers moi, d’un premier abord. Il me fit d'emblée une attestation d'acceptation de mon offre en échange d’un chèque du montant conclu, et, en le prenant, s’exclama à toute voix : « Considérez-vous comme propriétaire ! …et empressez-vous de débarrasser le local ». À ma demande, il me promit au passage de rétablir l'eau et l'électricité nécessaires au déménagement. Puis, tandis que je ressortais, il beugla encore à tue-tête dans son bureau que « le problème avec la bière, c’est que les gens n’en boivent pas assez ! ». Et ce fut là, sur ces bonnes paroles, le top départ officiel du projet de la Micro-Brasserie artisanale Tolas Helann !

En sortant de chez le mandataire, en ce vendredi soir, j'appelai directement ma femme pour lui annoncer la "grande" nouvelle, fou de joie, empli d'espoir et de fierté. Puis je prenais la route. Mais, dans toute cette confusion jubilatoire, je me rendis compte que le mandataire ne m'avait pas fourni la clé du local pour récupérer mon bien ! Je lui téléphonai immédiatement... Et il me dit sèchement qu’il ne l’avait pas, que je devais aller la chercher au domicile de l'ancien gérant ! Quoiqu'un brin surpris par les méthodes employées, je m’y pliai. Après un week-end festif, je récupérai la clé chez l’homme au chapeau, qui afficha dès lors un sourire satisfait à ses lèvres en me regardant partir.

Plus tard, je me rendis au capharnaüm où se trouvait mon nouveau trésor, promesse d’une nouvelle vie, plus simple, plus sereine, plus passionnante. Je m’y prélassai un moment, à moitié dans le noir, dégustai l’une et l’autre de mes bières bizarres nouvellement miennes, caressai les cartons, ouvrai quelques tiroirs, déambulai… Je ne remarquai rien à ce stade, si ce n’est les quelques pièces que l’ex gérant ne nous avait pas montrées : bureaux, salle de pause, locaux techniques, etc… toutes aussi fétide que le reste de la brasserie. Je ne m’y attardai pas. Je ne touchai à rien. Simplement, je savourais. Mais, tout de même, avec quelque part au fond de moi une espèce de gêne, de sentiment de mal-être, que j’associai sur le moment à l’ambiance de ce lieu sordide. Puis je repartis, car il y avait encore pas mal de détails à arranger avant de commencer le déménagement !

Dans les jours qui suivirent, avec ma femme et associée, nous nous rapprochâmes de quelques anciens employés de cette brasserie, notamment deux d’entre eux que nous allions reprendre pour notre projet. Nous nous donnâmes rendez-vous au vieux local pour préparer le déménagement. Sur place, avec cette troupe, les premières bizarreries remontèrent à la surface. Notamment de nombreux vides dans de nombreuses palettes ; des cartons manquants. « Pas étonnant, il vend des bières au noir depuis la fermeture, il a même été sur les marchés de noël alors qu’il était plus vraiment en activité », nous a-t-on alors confié. À la lueur de cette information soudaine, je dois dire qu’un frisson m’a traversé… Pas parce que c’était spécialement grave, mais parce que c’était une première mauvaise surprise, et que ça ouvrait la porte à d’autres… Je tentai alors de vérifier l'inventaire reçu tant bien que mal. Et il apparut très vite qu'il manquait bien d’autres choses... Outre des stocks de bières, du matériel de brasserie… « Bah il a revendu plein de trucs depuis la fermeture », nous précisa-t-on. Nous réalisâmes que l’ancien gérant nous avait volé une partie de notre achat avant même qu’on ne l’achète. Ce n’est pas bien méchant, penseront certains. Non, ce n’était pas bien méchant, à ce stade. Mais ce n’était qu’un début…

Nous avons alors tenté d’appeler le mandataire judiciaire pour lui faire part du souci, sans accuser personne (le voleur était à priori en détresse, pensions-nous, à ses dires, et nous étions complètement compréhensifs). Le téléphone du liquidateur sonna, mais pas de réponse. Tout à coup nous reconnûmes sa voix, parodiant un accent nord-africain dans un message de répondeur loufoque : « Oui, vous êtes bien sur le répondeur de Rachid Boulaouane, je ne suis pas disponible pour le moment, je suis rentré au pays, alors foutez-moi la paix », à peu de chose près… Nous avons halluciné… Le personnage était bien au-delà des descriptions qu’on nous en avait faite !

Nous lui signalâmes donc le problème par courriel, toujours en bannissant la moindre accusation. Sans jamais de réponse.

Les anciens employés restèrent un temps assez timide concernant les informations qu’ils détenaient sur l’ancien gérant et ses pratiques. Nous ne nous connaissions pas, après tout. Ce n’est que petit à petit que les langues se délièrent, au fil des semaines et des mois.

Dans un premier temps, ils se contentèrent, dans la joie et la bonne humeur, de se moquer gentiment de lui, et simplement nous invitèrent à rester vigilants ; celui-ci semblait être un filou masqué, finalement. On nous le décrit d’abord comme un excellent commercial, habile en manipulation, capable de vendre une glace périmée à un esquimaux, mais aussi comme un paresseux, qui venait rarement au travail (il avait notamment fait un Covid qui nécessita un arrêt de travail auto-proclamé de 6 mois), ou ne venant que tardivement pour finir affalé sur le canapé de son bureau, excepté quand il y avait une visite notable, comme celle de médias par exemple, où il était toujours le premier à entrer sur scène, puis à se pavaner gracieusement. En vérité il n’avait pas de réel attachement à son "bébé" dont il avait dû se séparer. Et tout n’était qu’artifices avec lui. Dès lors nous commençâmes à prendre nos distances avec cet homme douteux.

Dans la continuité de nos préparatifs au déménagement, nous fîmes face à la suite de nos déconvenues : le nouveau local où nous devions nous installer nous était soudainement refusé, pour une raison obscure. En parallèle, l’électricité n’était pas revenue comme promis, le mandataire ne donnait plus aucun signe de vie. Or le local était verrouillé par une grille métallique électrique, impossible de sortir notre matériel sans électricité ! J’appelai donc moi-même le fournisseur d’électricité qui me confia qu’il refusait de rétablir le courant car l’ancien gérant s’était joué d’eux, il n’avait payé quasiment aucunes factures, juste le strict minimum, de quoi maintenir légalement le courant, et au final il leur avait laissé une immense ardoise. L’homme au téléphone était très remonté et refusa froidement ma demande. J’appelai ensuite la communauté de commune, qui sous-louait le local à l’ex gérant, pour avoir leur appui concernant cette histoire d’électricité, et aussi prévenir que la remise du local aurait du retard du fait de toutes ces anomalies… Le responsable de la Com-Com me confia ne plus vouloir rien avoir à faire avec cet homme, sa brasserie, ou tout ce qui s’en rapproche, car il leur avait fait énormément de mal, de tort, n’avait jamais payé aucun de ses loyers, et avait profiter en parallèle de nombreuses aides et subventions ; il a refusé de m’aider… Bien plus tard, un employé de cette Com-Com rencontré au hasard d’une livraison me donneras le chiffre de trois-cent-mille euros. J’eus peine à le croire !